Numéro 14

Les deux piliers de l’écosocialisme démocratique

Dans quel monde vivons-nous ? Une société façonnée par les lois de l'économie qui donne au capital la souveraineté pour décider de ce qu'il faut produire, à quelles conditions sociales et écologiques. Rappelant la folie et la cruauté d'un monde organisé sur l'expansion et l'accumulation économique, J. Hickel esquisse une autre voie. Seule une décroissance organisée pourra affronter les crises écologique et sociale, réorienter les capacité de production pour supprimer les pénuries artificielles générées par le capitalisme et réduire les flux de matière et d'énergie.

Planification écologique : frein d’urgence ou administration de la catastrophe ?

Les plans de sauvetage ne manquent pas de surgir face à l'emballement des catastrophes et des inégalités. S'ensuit une renaissance de l'idée de « planification » pour piloter les sociétés industrielles dans un monde globalement instable. En retraçant l'histoire de cette idée, Geneviève Azam nous rappelle ici qu'aucune planification écologique ne pourra s’extraire de notre condition terrestre, de ses limites et de ses multiples interdépendances.

“J’adore la bagnole”: André Gorz répond à Macron

Quelques jours après le festin royal à Versailles, Macron met en scène sa "proximité avec le peuple". Avec l'éloge de la bagnole, pilier de sa planification écologique, à l'heure où le litre à 2€ étrangle de nombreux français.es et où les grands projets routiers étouffent les territoires. Nous republions "L’idéologie sociale de la bagnole", texte d’André Gorz de 1973. Le philosophe soulignait que le mythe de la bagnole accomplissait le rêve de tout capitaliste : "tous les hommes allaient dépendre pour leurs besoins quotidiens d’une marchandise dont une seule industrie détiendrait le monopole."

Monsieur le préfet des Hautes-Alpes,

Dans les Alpes, un projet d'extension d'un téléphérique sur un glacier fragilisé par le dérèglement climatique suscite une puissante opposition d'habitants. Pourtant, à ce jour, rien n'a pu arrêter l'appétit des aménageurs, alors que La Grave a résisté depuis des années à l’appel du tourisme de masse. Cette lettre ouverte est publiée à quelques jours d’une date butoir décisive pour la poursuite ou le renoncement du chantier.

Enquêter, s’émerveiller et se révolter avec Élisée Reclus

Bonnes feuilles – En 1869 et 1880, le géographe et militant anarchiste Élisée Reclus publie deux livres qui seront les plus réédités et traduits du grand savant. Avec Histoire d’un ruisseau et Histoire d’une montagne, Reclus s'adresse au plus grand nombre dans une langue vivante pour décrire la complexité et la beauté de la nature. Cent-cinquante ans plus tard, ces deux textes résonnent aussi comme des récits écologiques. Nous publions la préface de cette réédition.

Devant l’anéantissement du vivant, des naturalistes entrent en rébellion

Aux premières loges du désastre écologique, des naturalistes assument la portée politique de leurs pratiques de défense du vivant et des milieux. Ces professionnels et amateurs spécialistes de la biodiversité s’organisent pour sortir de leur impuissance. Cet entretien fleuve avec des membres des « Naturalistes des terres » offre une plongée dans un mouvement naissant et bouillonnant d’inventivité.

Descente énergétique ou salut par la fusion nucléaire ?

Drogué et perfusé aux énergies fossiles, le capitalisme va-t-il trouver son salut grâce à la fusion nucléaire ? Quelle direction prendrait la société industrielle si une improbable énergie nucléaire à très haut rendement voyait le jour ? Au lieu de croire qu'elle ouvrirait une période d'abondance heureuse, le spécialiste de permaculture David Holmgren invite à imaginer une descente énergétique frugale. Seule voie raisonnable pour briser la mythologie de la croissance.

Sensation caniculaire

Il y a un an, le méga-feux dévorant la forêt des Landes avait conduit Arthur Rimbaud à sortir de son silence post-mortem. Celui qui donnait au poète la mission de devenir “voyant” a confié à Terrestres une reprise actualisée de son poème Sensation écrit en mars 1870.

Dissolution : le nouveau roman de Gérald Darmanin

Il y a un mois, le gouvernement publiait finalement son décret de dissolution des Soulèvements de la Terre. D’un trait de plume, le pouvoir espère avoir fait disparaître ses opposants politiques. Quelle est la nature de ce texte porté par Darmanin ? Yves Citton a mené l’enquête et jette une lumière inédite et pleine d'humour sur la signification de ce décret romanesque. Il apparaît que les griefs formulés à l’encontre du mouvement peuvent être lus comme autant d’éloges.

La niche climatique humaine

L'hémisphère Nord (de l'Europe à l'Afrique du Nord, en passant par la Chine et les États-Unis) va connaitre cette semaine une canicule inédite, avec des températures comprises entre 35 et 50 °C. Si l’on peut ajouter des couches pour se protéger des grands froids, lorsque la chaleur devient insupportable, nous n’avons que notre peau à retirer. Mais jusqu’où et pour qui le climat peut-il devenir impropre à la vie humaine ? Selon une étude, il est possible qu’en ce siècle plus de 3 milliards de personnes soient exposées à un climat inhabitable.

L’usure du monde ou les méfaits de l’industrie touristique

Rarement évoquée, l’industrie du tourisme contribue pourtant largement à la catastrophe écologique et pèse près de 10 % du PIB mondial. Fondée sur l’énergie carbonée et accélérant la marchandisation du monde, cette industrie doit faire l’objet d’une révision en profondeur. Une société écologique postcapitaliste devrait-elle mettre un terme au tourisme ?

Désirer après le capitalisme

Le néolibéralisme a réussi un véritable hold-up sur nos désirs. Contre la consommation jouissive de marchandises, il est urgent de faire naître des pratiques et des imaginaires alternatifs. Le philosophe Mark Fisher réfléchit au futur de l'émancipation en revenant sur la contre-culture des années 1960-1970, où s’invente une "abondance rouge". Comment libérer le désir dans une perspective écologiste ?

Vous êtes, nous sommes, Les Soulèvements de la Terre

Face à la menace que représente un mouvement écologiste conséquent et déterminé à faire bifurquer nos sociétés, le gouvernement a choisi de dissoudre Les Soulèvements de la Terre. Et si cette dissolution était en réalité un appel ministériel à rejoindre un grand mouvement de résistance ? C'est en tout cas l'esprit de cette tribune publiée à l'issue de la dissolution.

Se soulever pour trouver l’air

Bonnes feuilles – Comment saisir ce qui se joue depuis des années sur le plan social, politique et écologique ? Le livre choral "On ne dissout pas un soulèvement, 40 voix pour Les Soulèvements de la Terre" propose une lecture polyphonique des multiples enjeux que portent ce mouvement. Dans ce texte extrait du recueil, la romancière Virginie Despentes brosse le portrait d'une fuite en avant économique et politique.

« Les Soulèvements proposent un ancrage terrestre au mouvement pour le climat » 

A l'initiative d’Emmanuel Macron, la dissolution des Soulèvements de la Terre est relancée. Derrière les agitations politiques, quel est le sens de cette coalition inédite de paysans, syndicats, mouvements climat et activistes, désormais portée par 170 comités locaux ? Dans cet entretien, deux compagnons de route du mouvement éclairent son origine, sa dynamique et sa solidité politique après deux années et demie d’existence. Ce dialogue est suivi d’un éclairage, “Pourquoi désarmer l’agro-industrie nantaise ?”, complexifiant la lecture dominante qui a accompagné l’action des Soulèvements le 11 juin dernier.

La trame des mondes et la modernité

Dans Les formes du visible, Philippe Descola réfléchit aux différents modes de figuration, soit la manière dont les humains rendent visible toutes sortes d’êtres (divinité, animal, mort) au moyen d’un objet matériel. Célèbre pour avoir mis au jour quatre ontologies qui structurent l’expérience de la vie et du monde des humains à travers le globe, l’anthropologue montre ici comment les images tissent les mondes vécus. Dans la modernité, les représentations de la nature ont-elles pour fonction de la réduire à un arrière-plan inerte, ou au contraire de lui donner la force d’une loi ?

Inondations et barrages dans la Vallée de la Vesdre. L’aménagement du territoire en question

A mesure que le dérèglement climatique s'intensifie et l'artificialisation des sols se poursuit, les inondations dévastatrices s'enchaînent à travers le monde. A l'été 2021, la Belgique a connu des pluies torrentielles qui ont entraîné 100 000 sinistrés. Cette enquête historique retrace 150 ans de projets de transformation et de modernisation de la vallée belge de la Vesdre. A travers l'histoire des barrages, c'est bien plus qu'un objet technique qui est examiné : c'est une « machine organique » où la technique, la géographie, la biologie, le politique et le social interagissent constamment.

Les pratiques naturalistes au service des luttes

Quand des naturalistes pro et amateurs se retrouvent pour mettre leurs savoirs au service des luttes, c’est toutes leurs pratiques qui se trouvent réinterrogées et réinventées. Lors de leur premier week-end de rencontres, le podcast "Avis de tempête" a recueilli leurs réflexions, et le dessinateur Jean-Alfredo Albert a mis en croquis leurs échanges. Nous sommes heureux de nous faire l’écho de ces regards croisés.

Qu’est-ce que l’inhumain ?

Il y a quelques années, un courant théorique dans les sciences humaines, le « tournant ontologique », se construisait autour de la proposition suivante : les différences ne sont pas simplement différentes perspectives sur le même monde, mais des différences de monde. Néanmoins, ces approches n’ont-elles pas perdu de vue les rapports de pouvoir ? Telle est la thèse d’un livre écrit par l’anthropologue Christine Chivallon, qui, pour répondre à cette impasse, propose le concept d’« inhumain ».

Les féminismes du Sud ancré. Vers une politique de la Terre habitée

A quoi ressemble l'écoféminisme d'Amérique du Sud ? Lina Álvarez-Villarreal revient dans ce texte sur ses spécificités. Parmi celles-ci, se dégagent notamment deux exigences : comprendre les multiples conséquences de ce que la colonisation a produit sur les femmes, les hommes et la Terre et apprendre à habiter librement depuis des histoires, des savoirs et des milieux dont on prend soin.