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Ce texte a été écrit dans le cadre de l’évènement « Ces jours terrestres », organisé par Utopiana à Genève et qui accueille le projet du Conseil Diplomatique des Bassins-versants.


Considérant :

que les glaciers des sources fondent, que le cycle de l’eau se dérègle et que les eaux salées montent,

que les fleuves et les rivières acquièrent progressivement une personnalité juridique aux quatre coins du monde,

que la Suisse accueille les sources de 4 des grands bassins-versants d’Europe : Rhône, Rhin, Inn (affluent du Danube) et Tessin (affluent du Pô),

que Genève est un centre diplomatique international anthropocentré qui ne tient pas réellement compte des bouleversements écologiques en cours,

Nous proposons d’établir sur les bords du lac Léman un Conseil Diplomatique des Bassins- Versants.

Cette institution potentielle aura vocation à porter les voix des diverses entités jusque-là invisibilisées (montagnes, cours d’eau, forêts, animaux, plantes…) qui sont pourtant les agent·es essentiel·les de la vie des bassins-versants, et dont la santé est aujourd’hui menacée.


Cela ne fait plus de doute : le dérèglement climatique est en train de changer la face de la Terre. 

Ce contexte de bouleversement général nous oblige à reconsidérer les manières d’habiter et de nous inscrire au sein de territoires en mutation. L’eau, condition de la vie sur terre, est l’élément à partir duquel se recompose une nouvelle politique des interdépendances vitales.

Les institutions politiques héritées de la modernité semblent de plus en plus impuissantes à répondre à la multiplication des catastrophes socio-écologiques et sanitaires — quand elles ne renforcent pas les causes de ces catastrophes en soutenant des logiques économiques extractivistes et productivistes qui accentuent toujours plus les injustices sociales et environnementales.

C’est pourquoi, un peu partout, des communautés habitantes s’organisent pour défendre et prendre soin de leurs rivières, de leurs forêts, de leurs montagnes, exigeant la reconnaissance de droits aux écosystèmes au sein desquels elles vivent, revendiquant leur attachement à la multiplicité des êtres avec lesquels elles peuplent leur territoire de vie, créant des réseaux de solidarité et d’entraide pour soutenir les plus vulnérables (humains et autres qu’humains).

Une bonne partie de ces initiatives viennent des pays des Suds. Ils nous confrontent, en tant qu’habitant·es de l’Occident moderne, aux logiques impérialistes qui ont présidé à ces dérèglements et à la nécessité de décoloniser nos manières d’habiter le monde. C’est depuis ces perspectives transformantes que nous souhaitons repenser les questions diplomatiques d’une façon écologique, et donc terrestre.

Depuis les Conseils de bon gouvernement des montagnes zapatistes (Mexique), depuis les tentatives de communes écologiques confédérées du Rojava (Kurdistan), depuis les massives manifestations agricoles de l’Inde, depuis les pratiques de reverdissement du désert au Sahel, depuis la reconnaissance de la personnalité juridique des fleuves (Whanganui en Nouvelle-Zélande et Atrato en Colombie) et des lagunes (Mar Menor en Espagne), depuis les réseaux de jardins permacoles australiens… Bref, depuis toutes les initiatives habitantes, réhabitantes, paysannes et autochtones du monde, nous souhaitons dire que les règles actuelles de la diplomatie ne nous conviennent pas et nous paraissent à la fois belliqueuses et obsolètes.

Plus près de nous et en écho direct à toutes les manières de composer avec son territoire de vie et d’en prendre soin, ces dernières années ont vu fleurir en Suisse et en France plusieurs initiatives visant à donner des traductions institutionnelles à diverses dynamiques habitantes : Syndicat de la montagne Limousine, Biovallée de la Drôme, Assemblées de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, Zones d’écologie communale des Lentillères (Dijon), Parlement de Loire et Assemblée populaire du Rhône, et bien d’autres.

Ces initiatives instituantes ne s’envisagent plus d’abord dans l’horizon des frontières définies par les découpages administratifs des États-nations modernes, mais suivent les cycles de l’eau et de la terre qui conditionnent le renouvellement des différentes formes de vie. Elles contribuent ainsi à l’émergence d’une nouvelle géographie politique capable d’accompagner les soubresauts d’une planète ébranlée. Ce qu’on pourrait appeler une géopolitique des bassins-versants.

Un bassin-versant est le territoire couvert par un fleuve et tous ses affluents. Chaque bassin-versant est un monde à part entière — qui soutient des myriades de vies humaines et autres qu’humaines. Depuis les lignes de partage des eaux qui entourent un bassin-versant, toutes les gouttes d’eau filent inexorablement jusqu’à la mer. Les bassins-versants sont donc les veines de la Terre1.

Dans le sillage de ces nouvelles dynamiques instituantes s’impose progressivement la nécessité d’inventer, à l’échelle européenne, des espaces de rencontre et de dialogue qui accompagnent la recomposition de ces territorialités politiques émergentes. C’est à cette nécessité que tente de répondre la recherche-création mise en place avec ce Conseil Diplomatique des Bassins-Versants. À côté de l’Organisation des Nations Unies à Genève, le Conseil Diplomatique des Bassins-Versants entend explorer les contours institutionnels d’une géopolitique terrestre capable de répondre aux défis de territoires en mutation. À ce titre, le territoire genevois apparaît à la fois comme un centre névralgique et un point de ralliement. Centre névralgique, car situé au cœur d’un véritable château d’eau continental naturel ; car posé au bord du plus grand lac alpin ; car capitale internationale de la diplomatie anthropocentrée ; car lieu d’implantation du futur collisionneur circulaire (l’un des plus grands projets industriels européens). Mais aussi point de ralliement, car agglomération transfrontalière en pleine redéfinition ; car, dans un mouvement tellurique, les Alpes déneigées peu à peu se soulèvent.

1. Partir des communautés réhabitantes : prendre soin des milieux de vie

Malgré l’extension du capitalisme extractiviste et néolibéral aux quatre coins du monde, des communautés « réhabitantes » subsistent et se déploient, encore et encore, dans les interstices d’un monde de plus en plus uniforme et monoculturel. La notion de réhabitation nous vient du mouvement biorégionaliste. « Un peu partout se déploient des communautés de gens qui tentent de nouvelles manières de vivre sur et avec la Terre2 », écrivaient Peter Berg, militant écologiste, et Raymond Dasmann, biologiste, dans leur article fondateur de 1976 « Réhabiter la Californie ».

Ces dernières décennies en France, on pourra par exemple citer les expériences de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes (et son fameux « Nous sommes la nature qui se défend »), celle du Syndicat de la Montagne Limousine (syndicat d’habitant·es autonome et multiculturel), celle du Comité Loire Vivante (collectif de collectifs qui, à la fin des années 1980, s’est fédéré à l’échelle du bassin-versant de la Loire pour lutter contre la construction de quatre grands barrages) et qui a trouvé un prolongement récent dans le processus du Parlement de Loire, ou encore celle de la Biovallée de la Drôme autour d’un renouvellement des pratiques agricoles pour prendre soin du territoire.

1.1 Territoires vivants

Ces différentes dynamiques habitantes (et instituantes) mettent en œuvre des stratégies différentes : défense des communs terrestres, droits de la nature, pratiques permacoles, etc. Mais elles ont pour point commun de repenser les territorialités (les attachements aux lieux) depuis les formes de l’habiter et les alliances entre humains et autres qu’humains. Les enjeux y sont multiples : retrouver le lien à la terre, allier justice écologique et justice sociale, prendre soin des interdépendances par et à travers des pratiques réhabitantes… Dans tous les cas, se trouve mise en jeu une redéfinition du territoire.

En effet, depuis ces perspectives nouvelles, le territoire n’est plus la portion d’espace gérée par une administration, mais un tramage dynamique qui tisse ensemble une pluralité de formes de vie. Depuis cette vision écocentrée (et non plus anthropocentrée), la métamorphose permanente de nos milieux de vie invite à repenser de fond en comble les considérations éthiques qui fondent nos décisions politiques. Ou, comme le disait déjà Peter Berg en 1986 : « Le lieu dans lequel vous vivez est vivant, et vous faites partie de sa vie. Quelles sont alors vos obligations à son sujet, quelle est votre responsabilité vis-à-vis du fait que ce lieu vous accueille et vous nourrit3 ? ». Dans le sillage de la vision biorégionaliste, notre question est donc la suivante : comment faire peuple depuis et avec les milieux de vie ? Et cela dans une perspective où lesdits peuples ne sont pas des entités déjà constituées, mais des peuples se constituant dans et à travers les alliances qu’ils nouent avec les différentes formes de vie qui tissent la trame d’un territoire complexe et changeant, la trame d’un « corps-territoire4 ».

1.2. Peuples terrestres

Depuis les territoires du vivant — et donc depuis les « corps-territoires5 » — s’invente la possibilité d’un « nous » élargi, plus qu’humain, redessinant les frontières (toujours ouvertes et accueillantes) de nos communautés de vie et les lignes de partage et de passage entre humains et autres qu’humains, donnant naissance à des manières de faire peuple qui ne répondent plus des coordonnées anthropocentriques et nationalistes héritées de la modernité : peuples-rivières, peuples-montagnes, peuples-forêts, peuples-littoraux6. Dans la plupart des cas, l’eau s’est avérée être le lien permettant de tisser de nouveaux rapports entre un « territoire » et une manière de faire « peuple ».

« À l’image du réseau cardio-vasculaire qui distribue à nos organes vitaux l’oxygène et les nutriments indispensables à leur vie, le réseau hydrographique constitue le véhicule qui transporte les êtres vivants, qui irrigue les terres et traverse les corps terrestres pour les relier les uns aux autres au sein de corps-territoires pluriels et vivants : du glacier à la rivière, de la source à l’estuaire, des terres à la mer, des nuages aux forêts, de la pluie aux nappes phréatiques… L’eau relie les corps, les territoires et les continents. Elle dessine d’autres frontières que celles instituées de manière arbitraire par les États-nations modernes : des zones de rencontre et de transition depuis lesquels il est possible de réapprendre à faire communauté, à tisser de nouvelles alliances entre humains et autres qu’humains7. »

C’est donc depuis les bassins-versants que nous souhaitons à la fois penser les questions des modes de vie écologiques que nous défendons et, par extension, ses traductions institutionnelles.

1.3 Institutions de bassins-versants

À quelles institutions peuvent donner naissance les peuples terrestres ?

Ces dynamiques réhabitantes nous invitent en effet à questionner le sens de la notion « d’institution ». Car, de fait, l’immense majorité de nos institutions politiques et sociales sont des institutions héritées qui reconduisent les principes de domination anthropocentrés et patriarcaux (reposant donc sur des formes de dominations raciales, genrées et reléguant les êtres de nature à n’être que des ressources). Comment dès lors considérer qu’elles pourraient être adaptées à ces manières d’habiter et de vivre radicalement autres ?

Ce qui nous intéresse donc ici, ce ne sont pas les dispositifs institués, figés, mais les processus instituants — ceux qui seraient en mesure d’accompagner les métamorphoses permanentes d’un territoire, l’inscription dans le temps des pratiques habitantes communautaires et les manières de faire peuple auxquelles elles donnent naissance. En d’autres termes, nous considérons qu’à travers de telles dynamiques instituantes, c’est le territoire lui-même qui s’institue comme « peuple terrestre8 ». Ou plutôt que ce sont les alliances entre des humains et des autres qu’humains qui devraient instituer le territoire comme entité politique.

L’imaginaire politique de la fédération des bassins-versants, si chère aux biorégionalistes, peut ici nous servir de source d’inspiration en nous invitant à refaire de l’eau le commun primordial de toute vie, et donc de toute politique. Elle nous permet d’envisager ce que pourraient être, dans toute leur diversité, des peuples de l’eau, capables de donner forme à des hydromondes : « ensemble de continuités écologiques, toujours plus qu’humaines, à l’intérieur desquelles nous sommes pris·es, que nous faisons et qui nous font à chaque instant, partout sur la planète9. » Un ensemble de relations d’interdépendance et de soin, ancestrales et existentielles, entre communautés de vie et milieux aquatiques. Et l’idée aussi que ces mondes aquatiques sont à la fois en nous, entre nous et au-delà de nous. Faire peuple depuis ces territorialités mouvantes que sont les bassins-versants nous oblige donc à repenser les enjeux géopolitiques à la racine.

2. Vers des politiques des cycles de l’eau : redessiner nos interdépendances

À la croisée des trois notions précédentes (territoires, peuples, institutions), les politiques de l’eau apparaissent comme une pierre de touche particulièrement intéressante pour repenser l’équation générale du désastre.

Depuis 1964 et la création des Agences de l’eau en France, la gestion de la ressource en eau par bassin-versant s’est imposée à toute l’Europe. Sauf qu’ici les mots comptent. Et « gestion » et « ressource » sont deux données profondément problématiques au sein des politiques de l’eau européennes. En effet, le soin des milieux est presque toujours considéré de façon anthropocentrée : les bassins-versants servent des usages humains, et doivent être gérés pour continuer à les servir, sans trop se détériorer. Une sorte d’exploitation « raisonnée », qui devient de moins en moins viable à mesure que la crise climatique s’accentue. Les Agences de l’eau sont donc une magnifique invention sur le papier, mais elles sont prises dans les rets d’un mode de pensée systémique, prônant l’utilitarisme et le ressourcisme, ainsi que la seule représentation d’intérêts et ses jeux de pouvoir sous le mode du lobbying.

2.1 Réhabiter avec les cycles de l’eau

Les circulations de l’eau (de surface, souterraines et atmosphériques) fonctionnent dans un emboîtement multiple de cycles. Et, face à l’augmentation des inondations et des sécheresses, c’est donc le respect de ces cycles qui semble devoir nous guider à présent. Autrement dit, comment s’orienter vers des « politiques des cycles de l’eau10 » ?

La première chose semble être la reconnaissance de l’importance desdits cycles au sein de nos institutions, car ce sont eux qui, à la fois, soutiennent toutes les dynamiques de la vie, et sont en train de se modifier à cause des bouleversements écologiques. La seconde, qui est liée, est celle de l’élargissement des enjeux démocratiques au-delà de l’humain. C’est ce que Vandana Shiva (activiste écoféministe indienne) a développé sous l’expression « démocratie terrestre » : envisager des modes d’organisation qui soient toujours respectueux de l’ensemble des facettes de notre grande famille terrestre11.

La question de la redéfinition des communs est ici centrale. Ce dont nous avons cruellement besoin, ce sont des communs plus-qu’humains, des communs bioculturels : c’est-à-dire des milieux de vie partagés à l’intérieur desquels les modes d’organisation humains permettent à tous les autres qu’humains (et les cycles de la vie plus largement) de s’épanouir le plus librement possible.

2.2 Permaculture et politique des communs

La permaculture, basée sur l’observation et l’imitation des cycles naturels, apparaît donc ici comme une éthique des plus inspirantes. Fondée dans les années 1970 en Australie, et aujourd’hui répandue à toute la planète, elle redéfinit la notion de « communs » dans une perspective post-industrielle et durable (soin des lieux et descente énergétique). En cela, la permaculture propose de repenser la place des humains au sein de leurs milieux et réinscrit la pratique agricole dans l’horizon d’une culture écologique plus générale fondée sur le soin. Concevoir des milieux qui nous nourrissent sans jamais les abîmer, voilà une éthique qui reboucle avec des pratiques autochtones et paysannes millénaires, et qui apparaît comme féconde pour enrayer le désastre.

Dès sa création, la permaculture s’est par ailleurs explicitement appuyée sur deux autres courants fondamentaux dans la reformulation du problème de cohabitation que nous essayons ici de reposer : le communalisme et le biorégionalisme. L’une avec ses communes écologiques autonomes confédérées, l’autre avec ses conseils de bassin-versant, ces deux approches sont également des piliers pour repenser le commun vital qu’est l’eau. Et même, plus encore, pour tenter de forger une nouvelle « démocratie directe de l’eau12 ».

Derrière cela, il s’agit de remettre les questions de subsistance au cœur de nos quotidiens. Car il n’y a pas de subsistance écologique véritable sans des politiques des cycles : les saisons, la lune, les eaux, la vie du sol… De ce point de vue, il y a des droits fondamentaux — ceux de la subsistance — dont nous sommes collectivement privé·es par la société marchande et extractiviste qui nous enserre. Et il s’agit de trouver des manières de « réclamer » ces droits (le terme reclaim, cher aux écoféministes, signifie à la fois revendiquer, se réapproprier et réparer). La création d’un Conseil Diplomatique des Bassins-Versants en est une.

2.3 Avec l’eau, régénérer nos interdépendances

Pour donner un exemple concret à tout cela, invoquons Hatakeyama Shigeatsu, ostréiculteur japonais qui, face à la pollution de sa baie de Kesennuma et à la mort massive de ses huîtres, a eu l’idée de créer un grand mouvement de replantation d’arbres avec les villages amont de son petit fleuve côtier. L’eau ainsi épurée — naturellement, mais avec l’intelligence des communautés humaines locales — a permis aux huîtres de repousser. Le magnifique récit de cette expérience, intitulé La Forêt amante de la mer13, nous plonge avec une grande simplicité dans les tâches qui aujourd’hui nous incombent : celles de défendre la fonctionnalité et la pérennité des cycles naturels. La quête de l’invention de « politiques des cycles de l’eau » apparaît ainsi comme une méthode — à la fois artistique, politique et scientifique — pour réinterroger nos manières d’accueillir les événements. Ce qui se cache derrière une telle approche, c’est donc bien la volonté de concevoir et d’assurer une hospitalité écologique véritable sur une planète de plus en plus bouleversée.

3. Droits de la Terre et démocratie des vivants : pour une Intermondiale des peuples de l’eau

Ces manières d’habiter les milieux de vie et de prendre soin des vivants trouvent une source d’inspiration importante du côté des résistances et persistances des peuples des Suds, en particulier du côté des peuples autochtones qui, depuis des siècles, cherchent à défendre leurs terres et conditions de subsistance contre les logiques d’accaparement et de destruction coloniales.

3.1 Les droits de la Terre-mère

Dans le contexte de l’Amérique latine, les luttes autochtones ont ainsi pris le relais d’un mouvement ouvrier en décomposition, redéfinissant le sens et l’horizon de la conflictualité politique. S’il s’agit de combattre les inégalités et dominations socio-économiques, il est aussi nécessaire de combattre toutes les autres formes de domination, dont les dominations patriarcales et coloniales qui reposent sur le cosmocide et sur l’écocide14 : sur la destruction de la pluralité des manières de faire monde et des milieux de vie. La particularité de ces combats est d’associer justice sociale et justice écologique. Ce qui s’exprime dans les diverses déclarations qui ont pu émerger en Amérique latine autour de la reconnaissance des droits de la Terre-mère (ou Pachamama) : « Tout comme les êtres humains jouissent de droits humains, tous les autres êtres ont des droits propres à leur espèce ou à leur type et adaptés au rôle et à la fonction qu’ils exercent au sein des communautés dans lesquelles ils existent15»

Si la Terre peut être assimilée à une mère c’est qu’elle constitue la puissance génératrice de toute forme de vie. Il s’agit dès lors de créer les conditions de régénération des cycles du vivant en prenant soin de cette « communauté de vie indivisible composée d’êtres interdépendants et intimement liés entre eux par un destin commun3 », ainsi que cela est mis en œuvre dans le « buen vivir16 » — formule qui désigne un mode de vie communautaire reposant sur une approche holistique des rapports entre humains et autres qu’humains.

3.2 Institutions-rivières et récits-fleuves

Les luttes autochtones et les déclarations des droits de la Terre-mère en Équateur (2008) et en Bolivie (2010) ont impulsé une série d’innovations institutionnelles importantes sur tous les continents de la planète : en Colombie, en Inde, en Nouvelle-Calédonie, en Nouvelle-Zélande, au Canada. Dans le contexte européen, les années 2019-2021 ont aussi vu fleurir plusieurs initiatives : sur la Loire, le Rhône, le Tavignanu, des collectifs habitants revendiquent la reconnaissance de droits pour leurs fleuves ou pour l’écosystème au sein duquel ils habitent. 

Plus récemment, en octobre 2023, la lagune du Mar Menor (en Murcie, Espagne) a fait l’objet d’une loi populaire validée par le Sénat espagnol la reconnaissant comme une personne morale. Ces revendications ne se limitent pas à une utilisation instrumentale du droit réduisant la personnalité à une « fiction juridique » pouvant être attribuée à des sujets non-individuels (comme pour les associations, entreprises, États), mais accompagnent ou traduisent des transformations sociales et culturelles plus profondes qui mettent en jeu la manière dont les habitant·es d’un territoire envisagent leurs rapports à l’ensemble des vivants17. Elles donnent lieu à l’émergence, dans le contexte occidental, de nouvelles formes potentielles d’autochtonies inventives, et dessinent les contours d’une démocratie des vivants à l’échelle des territoires de vie. Il est donc urgent d’inventer les institutions-rivières et les récits-fleuves18 qui les accompagnent.

3.3 Des peuples de l’eau et leurs hydromondes

Si l’on prend le cas devenu paradigmatique de la personnalisation du fleuve Whanganui porté par des peuples Maoris de Nouvelle-Zélande, c’est l’écosystème-fleuve dans son entièreté et son unicité, avec les collectifs humains qui habitent ses berges qui se voit reconnu au titre de personne juridique sous le nom de Te Awa Tupua. Comme l’indique l’adage maori « Je suis la rivière et la rivière est moi », le territoire du fleuve est moins considéré comme un ensemble de ressources naturelles ou comme une surface à aménager que comme une entité collective, relationnelle et ouverte. 

Dans cette perspective, le lien social entre humains fait corps avec le territoire, c’est-à-dire avec l’ensemble des formes de vie qui le traversent et s’y enchevêtrent. L’objectif de la « bonne politique » n’est plus d’agir seulement dans l’intérêt des sociétés humaines indépendamment de leurs relations aux autres qu’humains, mais en se situant du point de vue du milieu lui-même, c’est-à-dire en tenant compte de la santé et du bien-être des différentes échelles relationnelles qui constituent le sujet collectif du fleuve. Les êtres humains deviennent ainsi les membres d’un corps-territoire qu’ils participent à régénérer, réactivant ou réinventant des gestes, des savoirs et des savoir-faire vernaculaires pour renouer des alliances avec les autres qu’humains et donner naissance à des peuples de l’eau et à leurs hydromondes.

3.4 Une Terre pluriverselle

Si les institutions étatiques érigées à l’époque moderne en Europe répondaient à la délégitimation du régime politique de droit divin (en substituant à l’autorité divine l’autorité d’une Humanité se donnant à elle-même ses propres lois), les droits de la Terre correspondent à l’émergence d’une nouvelle source d’autorité et de normativité : celle de la Terre elle-même. Les autres qu’humains, les animaux, les forêts, les sols, les eaux, les vents, font irruption dans l’espace social et politique pour en questionner les fondements et rendre visible les liens d’interdépendances qui nous attachent à eux. Dans leur sillage, ce sont aussi les manières de faire monde des peuples et toutes les formes de vies anéanties par la colonisation modernisatrice qui refont surface, dessinant l’horizon de démocraties pluriverselles19, capables de faire lien entre une pluralité de mondes depuis des territoires vivants.  La Terre ici en jeu est moins le globe, cette totalité abstraite et uniformisante gouvernable depuis la position d’une expertise hors-sol, qu’une Terre habitée, composée d’une pluralité de mondes : une Terre-mondes, un plurivers. L’enjeu d’une diplomatie terrestre consiste dès lors à accompagner l’émergence des différentes manières de faire monde, et à rendre possible leur dialogue et interaction : autrement dit, œuvrer à la constitution d’une intermondiale des peuples de l’eau.

4. Diplomatie terrestre et politique de l’hospitalité : créer des alliances situées et des réseaux de solidarité

L’horizon d’une Terre pluriverselle oblige à réinventer les formes de la diplomatie. Car l’enjeu n’est plus seulement, comme dans le paradigme stato-national moderne, d’éviter la guerre entre États20 tout en présupposant la guerre comme soubassement du politique21, mais bel et bien de négocier les interdépendances qui conditionnent le renouvellement des différentes formes de vie terrestres. 

4.1 Politiques de l’hospitalité 

L’augmentation des instabilités climatiques va, de plus en plus, mettre en péril la possibilité d’habiter (l’habitabilité) en de nombreux endroits du monde, sans qu’on puisse tout à fait prévoir comment : réfugié·es climatiques, sécheresses et pollutions, sols de plus en plus inaptes à nous nourrir, etc. Nous faisons aujourd’hui face — même malgré nous — à toute une série de nouveaux défis de l’accueil.

Le modèle moderne d’une diplomatie d’État s’avère inadéquat pour y répondre puisque le paradigme politique sur lequel il repose est celui d’une souveraineté nationale propriétaire d’un territoire à défendre contre un « étranger » toujours perçu comme potentiellement hostile. En jouant sur le double sens du mot grec « hostis » signifiant à la fois l’ennemi et l’hôte (invité et invitant), nous pourrions dire que l’enjeu de la diplomatie terrestre est de transformer l’ennemi en hôte22, et donc la politique de la guerre en politique de l’hospitalité.

Celle-ci soulève de nouveaux enjeux qui remettent en cause les valeurs fondamentales de notre modernité politique : Comment prendre soin d’une rivière polluée ? Comment répondre à la mort massive des espèces ? Comment se mettre à l’écoute d’un glacier en train de fondre, et des relations d’interdépendances qui le conditionnent et qu’il contribue à nourrir ? Comment faire alliance en amont et en aval du fleuve pour régénérer les cycles du vivant ? Comment répondre collectivement aux crues, aux inondations, aux grands feux, aux tempêtes ? Comment et à quelles échelles renouer des solidarités entre êtres vivants, en tenant compte des spécificités de chaque territoire et des différentes manières de l’habiter ? C’est à de telles questions que doit tenter de répondre la diplomatie terrestre à laquelle nous ouvrons la voie.

Celle-ci ne pourra se définir qu’en partant des revendications des communautés habitantes, car ce sont elles qui, les premières, subissent et subiront les conséquences des désastres écologiques.

4.2 Une diplomatie pour des conflictualités agonistiques

Ces déstabilisations risquent d’accroître les conflits autour des communs terrestres (eau, terre, air), avec la menace que certains groupes cherchent à asseoir leur domination ou s’accaparent ces communs au détriment d’autres. Alors comment prendre en charge collectivement ces conflits sans reconduire le modèle politique de la guerre, de l’opposition entre amis et ennemis23 qui suppose toujours la victoire d’un camp par l’anéantissement ou la soumission de l’autre ? Comment affronter les conflits dans une perspective de soin et d’hospitalité ?

Pour cela il nous paraît nécessaire de revoir de fond en comble le modèle de l’agir politique en mettant en œuvre une politique agonistique24. Celle-ci change la nature de la diplomatie puisqu’elle ne se donne plus pour but premier de défendre les intérêts de tel ou tel groupe contre ceux d’un autre, mais d’accompagner les processus de transformation collectifs en accueillant les tensions, les conflits d’usages et les conflits de mondes qui surgissent dans l’expérience de cohabitation des territoires. Par exemple : en montrant l’incompatibilité entre certaines chaînes d’interdépendance (maïs, pesticide, production intensive, transport à distance, consommation de pétrole) et leurs propres conditions d’existence (présence d’eau, biodiversité, fertilité des terres) ; en tentant d’articuler de nouvelles chaînes d’interdépendance ; ou en créant de nouvelles alliances et transversalités entre collectifs habitants. L’agone opère « un décentrement des individus au profit des relations qui conditionnent leur existence au sein d’un lieu de vie commun, en tenant compte de la manière dont les différents êtres habitant ou fréquentant le lieu sont touchés par le conflit3 ». Elle ouvre l’espace-temps d’une négociation des interdépendances.

Dans la perspective d’une politique agonistique, l’horizon de la diplomatie terrestre est de penser et de poser les conditions d’un accueil de l’autre dont on dépend en rendant possible la transformation réciproque que cet accueil exige : en donnant en retour de ce qui nous a été donné, en reconnaissant le lien d’obligation que le don institue. 

Le diplomate agit sur le seuil, à la lisière, sur la ligne de partage, mais son objectif n’est plus de garantir l’immunité du corps collectif (national) contre l’étranger. Au contraire, il doit désormais chercher à négocier les formes du passage, de la transition et de la transformation : un agent de liaison garant du contre-don. L’action diplomatique peut dès lors s’envisager, non plus seulement comme la traduction entre deux cultures (politique, linguistique, culturelle et sociale), mais comme un processus de transduction au service d’une métamorphose collective, au sens où la transduction désigne « l’opération par laquelle deux ou plusieurs ordres de réalités incommensurables entrent en résonance et deviennent commensurables par l’invention d’une dimension qui les articule et par passage à un ordre plus riche en structures3. »

Le diplomate est un passeur de mondes25. Pour répondre à la diversité des manières de faire monde et rendre possible leur dialogue, la diplomatie ne peut se concevoir comme préexistante au conflit sous la forme d’un corps constitué ; elle doit s’inventer, en situation, en tenant compte de la singularité du conflit qui a émergé. L’action diplomatique consiste dès lors dans l’invention des espaces et des fonctions capables d’articuler la transduction en négociant les alliances terrestres nécessaires au renouvellement des différentes formes de vie qui tissent la trame des corps-territoires. Elle contribue à mettre en œuvre ce que l’anthropologue Arturo Escobar appelle des « zones de contact pluriversel » : des espaces-temps de rencontre et de transition entre les mondes et les manières d’habiter les territoires.

4.3 Prendre soin des corps-territoires

La diplomatie terrestre prend sens à l’aune d’un triple geste :

  1. Prendre en charge les conflits où ils apparaissent, c’est-à-dire à même les territoires de vie, avec les actrices et acteurs concernés, pour tenter de soigner collectivement les blessures infligées par les catastrophes écologiques et faire barrage aux logiques d’accaparement et de domination.
  2. Prendre soin des interdépendances vitales en inventant des écosocialités situées et des solidarités entre humains et autres qu’humains.
  3. Créer les conditions d’un dialogue interculturel et interspécifique pour rendre possible la cohabitation entre une pluralité de manières de faire monde.

La diplomatie terrestre se doit de contribuer à dessiner d’autres partages et passages au sein de territoires habités en commun. Elle constitue en ce sens un élément essentiel de la recomposition des territorialités politiques depuis et avec les cycles du vivant dans l’horizon d’une Terre pluriverselle.

5. Un Conseil diplomatique en terre lémanique : un processus instituant pour des Versants-Unis

Genève est située à un endroit stratégique au cœur du bassin-versant du Rhône. Mais c’est aussi une ville qui entretient depuis le Moyen-âge un rapport ambigu à son territoire. La Réforme a fait de Genève, cité indépendante, une île au milieu d’un territoire hostile ; et puis l’adhésion à la Confédération helvétique à la suite des guerres napoléoniennes lui a donné un statut de neutralité et d’impartialité. Dès lors, comme Genève n’était pas elle-même ancrée dans son territoire, elle pouvait être le lieu où les États échangent sur leurs différends, où les divers corps politiques constitués et reconnus de la planète pouvaient se rencontrer au calme. 

5.1 Léman : un lieu de diplomatie intermondiale

Cependant, Genève est une vraie ville, entourée d’une vraie campagne, au bord d’un vrai lac, le Léman, et à travers laquelle passe le Rhône et un certain nombre de ses affluents, notamment l’Arve, mais aussi des rivières plus modestes comme l’Allondon ou la Laire. L’agglomération genevoise a en outre la particularité d’être partagée entre deux États, sa partie suisse étant presque enclavée en territoire français, avec seulement 6 km de frontière commune avec le reste de la Suisse. Les enjeux de gouvernance transfrontalière y sont complexes et difficiles à affronter, notamment en raison du fait que les territoires politiques n’ont pas les mêmes compétences localement, alors même que les enjeux liés aux rivières deviennent de plus en plus cruciaux, comme on peut le constater concernant le débit du Rhône — qui dépend à long terme de la conservation des glaciers à sa source, et qui est nécessaire à l’économie française puisque plusieurs centrales nucléaires sont situées le long de son cours.

5.2 Pour une Europe des Versants-unis

Ainsi, Genève se définit à la fois par une longue expérience de la diplomatie humaine et par un rapport contradictoire et complexe avec son propre territoire. Genève a également, depuis la fin du siècle dernier, commencé à prendre soin de ses cours d’eau, avec des projets importants de renaturation, notamment sur l’Aire et sur la Seymaz (affluents de l’Arve), réalisés entre 2000 et 2010. Genève est aussi une ville Suisse, pays qui accueille sur son territoire alpin les départs de deux des principaux fleuves en Europe de l’Ouest, le Rhin et le Rhône ; mais aussi l’Inn et le Tessin (deux grands affluents du Danube et du Pô). Avec ses nombreux glaciers, la Suisse a également pu être considérée comme le « château d’eau de l’Europe ». Ces fleuves traversent des frontières, de sorte qu’une réflexion sur les bassins-versants est d’emblée, vue depuis la Suisse, un enjeu transfrontalier — contrairement à la Loire qui n’appartient qu’à une seule nation. Enfin, Genève est aussi un lieu de diplomatie non étatique, et informelle avec un grand nombre d’ONG et des groupes de citoyen·nes actifs sur toutes sortes de thèmes. Cette ville est un lieu de rencontres.

Pour toutes ces raisons, il paraît pertinent d’établir le Conseil Diplomatique des Bassins-Versants à Genève, porteuse d’une singulière expérience à la fois spatiale et historique. 

5.3 Un Conseil terrestre pour une culture pluriverselle

Le Conseil Diplomatique des Bassins-Versants sera un espace de dialogue entre les différentes dynamiques instituantes dans les territoires au niveau européen et mondial. Un espace de dialogue où les act·rices humains et non-humains pourront échanger, en prenant le parti de leurs lieux de vie, et des défis et des luttes qui s’imposent pour maintenir et épanouir les milieux qui s’y déploient. Il se pense, depuis le Léman, comme un espace ouvert sur les conflits de monde rencontrés au sein des divers bassins-versants européens et mondiaux.

Le Conseil Diplomatique des Bassins-Versants a ainsi pour vocation aussi de constituer des re-sources pour les pensées et pour les luttes, en vue de l’autonomisation progressive des territoires de bassins-versants, ainsi que de leur confédération. Les réflexions issues de toutes les expériences singulières sur les différents continents doivent être partagées en vue d’une réelle coordination intermondiale des modes de vie autochtones. Il sera aussi un lieu de débat sur les stratégies politiques et juridiques le mieux adaptées pour faire reconnaître la voix des act·rices autres qu’humains.


Objectifs du Conseil Diplomatique

– Être un lieu de diplomatie interspécifique pour assumer des débats, controverses, conflits d’usage à l’échelle des bassins-versants, en partant des dynamiques habitantes ;

– Devenir un lieu-source pour visibiliser les pratiques réhabitantes et défendre les droits et communs d’usage ;

– Penser et rassembler des outils pour défendre les communautés habitantes (outils juridiques, partage de savoirs et savoir-faire, liens collectifs/associations/chercheu·ses…) ;

– Être un espace de dialogue entre stratégies institutionnelles différentes (assemblées populaires, syndicats de territoire, défense des communs, droits de la nature…) ;

– Produire une culture écocentrée (territoires apprenants, savoirs communautaires, humanités écologiques).

Avril 2024, Genève.


Texte écrit par David gé Bartoli, Sophie Gosselin, Marin Schaffner et Stefan Kristensen

Visuels : Clémence Mathieu


Programme des rencontres » Pour un Conseil Diplomatique des Bassins-Versants » :

https://www.1000ecologies.ch/conseil-diplomatique-bassins-versants-20-avril

https://www.1000ecologies.ch/conseil-diplomatique-bassins-versants-21-avril

https://www.1000ecologies.ch/conseil-diplomatique-bassins-versants-22-avril


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Notes

  1. Voir Les Veines de la Terre : une anthologie des bassins-versants, F. Guerroué, M. Rollot & M. Schaffner, Wildproject, 2021.[]
  2. Voir Qu’est-ce qu’une biorégion ?, Mathias Rollot & Marin Schaffner, Wildproject, 2021.[]
  3. Ibid.[][][][]
  4. Expression que nous reprenons à des militantes écoféministes maya du Guatemala. Cf. « « Corps-territoire et territoire-Terre » : le féminisme communautaire au Guatemala. Entretien avec Lorena Cabnal », Cahiers du Genre, vol. 59, no. 2, 2015, pp. 73-89. Voir aussi Vivantes, des femmes qui luttent en Amérique latine, éd. Dehors, 2023.[]
  5. Nous entendons par « corps-territoire » la trame des interdépendances qui se noue entre des corps (humains et autres qu’humains) et à partir desquels se forment des communautés terrestres et des biorégions. Voir Sophie Gosselin & David gé Bartoli, La condition terrestre, habiter la Terre en communs, éd. du Seuil, 2022, chap. 4.[]
  6. Voir Sophie Gosselin et David gé Bartoli, La condition terrestre, habiter la Terre en communs, Seuil, 2022, chap.4.[]
  7. Sophie Gosselin « Pour une Europe des Versants-Unis », in Reconstruire la pensée européenne, dir. Dominique Bourg, éd. Hermann, 2024.[]
  8. Voir Sophie Gosselin et David gé Bartoli, La condition terrestre, habiter la Terre en communs, Seuil, 2022, chap. 4.[]
  9. Voir « Pour une intermondiale des bassins-versants », in Les Veines de la Terre : une anthologie des bassins-versants, F. Guerroué, M. Rollot & M. Schaffner, Wildproject, 2021.[]
  10. Pour reprendre le titre du colloque organisé par Mathias Rollot & Marin Schaffner en mai 2024 : https://cerisy-colloques.fr/eau2024/[]
  11. Vandana Shiva, Mémoires terrestres, trad. Marin Schaffner, Rue de l’Echiquier/Wildproject, 2023.[]
  12. Voir Hydromondes, « La biorégion, creuset d’une démocratie directe de l’eau », Bascules, 2023.[]
  13. Hatakeyama Shigeatsu, La Forêt amante de la mer, Wildproject, 2019.[]
  14. Depuis décembre 2021 le Parlement européen reconnaît juridiquement le crime d’écocide. Sur la question de l’écocide, voir Valérie Cabanes, Un nouveau droit pour la Terre, éd. Seuil, 2016.[]
  15. Déclaration universelle des droits de la Terre-mère, adoptée en 2010, lors de la Conférence mondiale des peuples contre le changement climatique, à l’initiative des peuples amérindiens qui demandent l’adoption par l’ONU. https://ecovillageglobal.fr/IMG/pdf/declaration_droits_terre.pdf[]
  16. Pablo Solón, « Le « buen vivir », une autre vision du monde », Revue Projet, vol. 362, no. 1, 2018, pp. 66-72[]
  17. Cf. Sophie Gosselin et David gé Bartoli, La condition terrestre, ibid.[]
  18. Cf. « Pour une intermondiale des bassins-versants », in Les Veines de la Terre : une anthologie des bassins-versants, F. Guerroué, M. Rollot & M. Schaffner, Wildproject, 2021.[]
  19. Plurivers : un dictionnaire du post-développement, Wildproject, 2023.[]
  20. Laurence Badel et Stanislas Jeannesson, « Une histoire globale de la diplomatie ? », Diplomaties , éd. Armand Colin, 2014.[]
  21. Ainsi le laisse entendre la célèbre phrase de Clausewitz selon laquelle « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens ». Le sens même de l’activité politique ne semble prendre sens que sur le fond d’un état de guerre permanent s’articulant autour de l’opposition ami/ennemi.[]
  22. Quand bien même cela nous troublerait. L’acception de la transformation est une condition de l’hospitalité mais aussi, de manière plus générale, de la vie.[]
  23. Voir Carl Schmitt, Le nomos de la Terre, PUF, 2001.[]
  24. L’« agone » désigne chez les grecs anciens l’art du combat réglé. Pour un approfondissement de son sens politique, voir Sophie Gosselin et David gé Bartoli, La condition terrestre, habiter la Terre en communs, éd. Seuil, 2022, chap. 3.[]
  25. Voir David gé Bartoli et Sophie Gosselin, Le toucher du monde – techniques du naturer, éd. Dehors, 2019[]